Cette réforme comprend quatre projets de textes de lois. Le caractère d’urgence n’a pas été attribué à ces textes : la procédure d’adoption est donc normale.
A l’issue d’une réunion (non publique) avec notre députée, Marie Lou Marcel, pour les lecteurs du blog voici un point sur la réforme des collectivités territoriales.
Ces textes viennent de passer à l’Assemblée nationale en 1ère lecture. Ils ont été adoptés par la seule majorité.
Ils étaient d’abord passés au Sénat puisqu’ils concernent les collectivités territoriales (dans ce cas le Sénat intervient avant l’Assemblée nationale).
Ils devraient passer au Sénat en 2ème lecture courant juillet 2010.
Si l’adoption intervient rapidement, ils pourraient revenir à l’Assemblée nationale, en 2ème lecture, avant la coupure de l’été, sinon à la rentrée.
Il convient de savoir qu’à partir de fin juin, l’assemblée nationale entame la discussion de la loi sur la modernisation de l’agriculture : le programme sera donc chargé.
Si, en 2ème lecture, l’Assemblée nationale adopte le texte dans la même rédaction que celle du Sénat, les lois sont adoptées. Si elle introduit des modifications, une commission mixte (Sénat et Assemblée nationale) votera le texte définitif.
Donc, selon toute vraisemblance, la réforme devrait être adoptée fin octobre ou novembre au plus tard.
Par rapport au projet initial des évolutions importantes sont intervenues.
Le principe des élections simultanées des conseillers territoriaux (généraux + régionaux) en 2014 est maintenu. Certains mandats en cours seront donc abrégés.
Est maintenu le scrutin uninominal (un seul nom comme pour les conseillers généraux actuellement). Il sera effectué par canton. Toutefois, le scrutin ne sera plus à un tour comme il était prévu, mais à deux (pour être élu au 1erème tour permettra des désistements et des regroupements de voies. tour, le candidat devra avoir obtenu la majorité absolue). Le 2
Au moment de la présentation des textes à l’Assemblée nationale, le nombre exact des conseillers territoriaux n’était pas connu des parlementaires. Le nombre par département a été introduit, sous la forme d’un amendement du Gouvernement, en cours de discussion à l’Assemblée nationale. Il a réservé des surprises.
On se souvient que l’une des motivations initiales pour cette réforme était de réaliser des économies en réduisant le nombre de conseillers (généraux et régionaux).
Le département de l’Aveyron qui compte 46 conseillers généraux (46 cantons), devait en compter, après la réforme, de 17 à 20. Or, notre département en comptera 30.
La région passera de 91 conseillers actuellement à 255.
Entre les régions, il n’existe aucune harmonie sur le rapport nombre de conseillers/nombre d’habitants. Les disparités actuelles subsistent. Le découpage est essentiellement politique.
Le découpage des cantons n’est pas connu. Mais on peut penser qu’il existe. Sinon, pourquoi 30 cantons, en Aveyron, plutôt que 29 ou 31 ? Pour déterminer le nombre, la projection sur le terrain a été indispensable.
Les missions précises des deux assemblées ne figurent pas dans la réforme. On suppose donc que seront maintenues les missions essentielles actuelles : le social pour les départements et l’économique pour les régions.
Les financements croisés (département + région) sur un même projet seront interdits : ce sera l’un ou l’autre selon les compétences. Pour la culture, le sport et le tourisme les financements croisés demeureront possibles. Cependant, l’Etat qui interdit ces financements croisés les pratique : pour la RN 88 qui lui incombe entièrement, il fait appel aux régions et aux départements concernés.
Comme les départements et les régions n’auront pas les moyens d’agir isolément sur des dossiers importants, on peut craindre que bon nombre de projets ne voient plus le jour. Outre les conséquences au niveau des services au public, l’économie locale s’en trouvera affectée : les entreprises trouvent une part importante de leur activité dans les marchés publics.
Les régions n’auront plus de fiscalité directe (impôt). Leurs ressources dépendront exclusivement des dotations de l’Etat (on en connaît les risques : transfert de compétences et pénurie de moyens), auxquelles s’ajouterait une taxe sur les permis de conduire. A terme, l’asphyxie des régions est donc inéluctable. On croit comprendre le pourquoi de cette volonté… Il fût un temps où les départements étaient menacés dans leur existence, aujourd’hui ce sont les régions.
Les Communautés de communes sont maintenues et renforcées : toute commune devra être intégrée à une communauté en 2013. Ces communautés, après 2014, devraient regrouper 5 000 habitants au moins. Des exceptions sont prévues pour les zones de montagne.
Les cantons seront redécoupés. Ce découpage interviendra au sein de chaque circonscription actuelle (Rodez, Villefranche et Millau pour l’Aveyron). Quid du canton de Rignac ?
Pour les prochaines élections municipales de 2014, toutes les communes de plus de 500 habitants (donc Rignac) seront soumises au scrutin de liste (comme actuellement les communes de plus de 3 500 habitants). Le panachage possible sera donc terminé et toute liste devra être complète pour être prise en compte. L’élection se fera à la proportionnelle et au plus fort reste. Sur chaque liste de candidats, les personnes qui seront susceptibles de siéger au conseil de la Communauté de communes (si elles sont élues au conseil municipal, bien entendu) seront indiquées par une flèche. Ce ne seront plus les conseils municipaux qui désigneront leurs représentants à la communauté de communes.
Quelques analyses de notre députée sur ce projet en cours ?
-
Les économies recherchées se transforment en surcoûts : plus de conseillers donc plus d’indemnités, la nécessité de construire partout de nouveaux locaux (hémicycles, salles de réunions, bureaux), plus de frais de déplacements, etc… ;
-
Le fait que les mêmes élus siègent au département et à la région peut apparaître positif ; toutefois, ces élus deviennent des professionnels à temps plein de leur mandat politique : un mandat politique n’est pas un métier, il est très aléatoire quant à sa durée (moyenne du mandat des députés : 7 ans) ; en conséquence quel salarié du privé pourra s’engager ?
-
Le scrutin uninominal et non de liste, aura deux conséquences fâcheuses pour la région : d’une part, la disparition de la parité femmes – hommes qui régit actuellement les listes de candidats (donc certainement encore plus d’hommes élus et moins de femmes !) ; d’autre part, les conseillers ne se connaitront pas entre eux, y compris au sein d’un département ;
-
Cette réforme conduira les régions à l’asphyxie financière en la privant d’une fiscalité propre ;
-
Les régions seront sous la coupe de l’Etat : c’est le mouvement opposé à celui de la décentralisation ;
-
La réforme intervient dans la précipitation, sans analyse suffisante des conséquences et dans le brouillard quant son application concrète sur le terrain.
-
La mise en application en 2014 suit de deux ans 2012 et donc les deux élections majeures (présidentielle et législatives). La nouvelle majorité, si elle est différente, pourra intervenir sur les points jugés négatifs.
En conclusion…
Les textes sont passés en première lecture. Il convient donc de rester prudents sur les analyses et d’attendre leur adoption pour connaître leur contenu définitif.
Marie Lou Marcel n’a pas oublié l’invitation de l’association Rencontres Citoyennes pour présenter le fonctionnement de l’Assemblée nationale et son travail. Elle propose de présenter également cette réforme des collectivités territoriales lorsqu’elle sera parvenue à son terme, soit, en principe, en novembre prochain.
Louis Bras